Noël comme un éveil

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La symbolique de Noël dépasse les récits et les traditions. Il y a plus de deux mille ans déjà, on fêtait chez nous les Saturnales du 17 au 21 décembre au moment du solstice d’hiver et le 25 était grande fête de la lumière, avec la naissance du dieu Mithra. Et cette année encore, il semble que nous ayons envie de fêter Noël, de nous réfugier dans son symbolisme enfantin. Depuis début novembre s’amoncellent dans les rayons des supermarchés, des calendriers de l’Avent, des guirlandes, des crèches et toutes sortes de sapins. Quelque chose en nous reste attiré par le mystère de la nativité, ou déteste cette période. Au delà des circonstances historiques des Noëls de notre vie, en deçà des traditions religieuses, revisitons donc ces récits d’une façon qui nous soit profitable aujourd’hui. Avant de sortir au jour, la graine se prépare et se fendille au profond de la terre, dans le noir elle se prépare à la lumière et ces dates célèbrent une transformation qui nous concerne tous. Jusqu’à notre mort, nous aurons des graines de nouveau enfouies dans notre terre, qui auront besoin de soutien : le soutien de la fête. De quelle nouveauté, de quelle naissance s’agit-il ? Et comment accompagner cette germination ? Toutes les civilisations proposent des enseignements à ceux qui s’intéressent à une autre dimension d’eux-mêmes, afin qu’ils puissent accéder au « divin enfant » que chante le cantique. La nôtre ne fait pas exception et on peut découvrir dans les récits évangéliques et les traditions populaires comme un tutoriel, une sorte d’assistance en lignes – lignes au pluriel, lignes de bible bien sûr ! pour notre propre re-naissance.

Cela commence comme un conte. N’aurait-il pas été plus efficace d’appeler un chat un chat et de parler clairement ? eh bien non ! Parce que le subconscient et l’enfant en nous, aiment les histoires et s’ennuient quand c’est trop sérieux, parce qu’ils écoutent avec le cœur. Il faut redevenir comme un enfant et participer à l’histoire comme le petit qui retient sa respiration ou complète les phrases qu’on lui propose. Parce que si on ne participe pas, ça ne marche pas, on oublie. Et puis, l’aspect inoffensif du conte lui a permis de traverser presque indemne toutes les folies de l’histoire. Jésus a été crucifié, les chrétiens sont persécutés dans de nombreux endroits, et perdurent tant bien que mal les contes de Noël.


Entrons donc dans ce récit comme des enfants, glissons-nous dans le tableau. De même que dans les rêves chaque partie du rêve représente le rêveur, jouons à ce que chaque partie du conte de la nativité nous représente pour sentir et comprendre en quoi il nous concerne aujourd’hui encore (je n’invente pas ce procédé, c’est depuis longtemps une technique jésuite). Voici: une femme douce et tranquille, son mari, un merveilleux bébé, des bergers et leurs agneaux, des rois en somptueux équipage, un bœuf, un âne. Tous, ils sont nous. Il fait nuit et un peu froid. Au dessus de la crèche, une étoile et le firmament déployé, un firmament de 25 décembre. Le bruissement de l’aile des anges accompagne le souffle régulier des gens et des bêtes. Vous y êtes ? Partout, c’est encore nous.

L’histoire que Luc va nous conter commence au chapitre deux – deux comme le chiffre de la lettre b, Beth en hébreu, qui inaugure la Genèse : « Bereschit, « au commencement », Beth comme la lettre B de Bethléem aussi, où nous allons nous rendre maintenant. Si ce n’est pas pure coïncidence, cela signifie qu’avant que la matière ne se forme, il y a un numéro 1.

Donc, “En ces jours-là parut un édit de l’empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre. […] Et tous allèrent se faire recenser, chacun dans sa ville d’origine.”

Le Christ naît dans l’histoire des hommes au moment où on dit que l’occupant romain impose un recensement obligatoire avec déplacement des populations vers le lieu de naissance. Les Romains ne badinent pas avec l’ordre et leur pouvoir est tel qu’il s’étend sur toute la terre (du moins c’est leur point de vue). Il se serait donc agi de compter tous les humains de la terre.

Dans la Bible aussi, David, ancêtre de Jésus, procéda au recensement de son peuple mais ensuite, Dieu lui infligea le choix entre sept années de famine, trois années de défaites ou trois jours de peste… Bigre ! Pourquoi ? Parce que dans le principe même, recenser, c’est dénombrer. On ne peut dénombrer que le multiple, que des objets, alors que Dieu est Un. Autant dire que nous n’avons pas à projeter un Dieu comme un vieux barbu sur un nuage, un numéro de plus par rapport au nôtre, fût-il le premier numéro de la liste… Non. Le deuxième plutôt, après nous. Ce qu’on nomme Dieu est au contraire indénombrable, puisqu’il n’a pas de forme, avant les formes, énergie pure. Contenant sans forme de toutes nos formes, unité d’amour, lumière qui est vie. Aujourd’hui, on peut parler de l’unité de façon laïque en s’appuyant sur les sciences, puisqu’une seule et même structure régit la multiplicité des formes de l’univers et que Max Planck reprend les termes bouddhistes en parlant de vide plein dans lequel se trouvent les objets.

Donc, le multiple cache et révèle l’unité, si on s’intéresse à l’Un. Mais si on s’intéresse au multiple, on recense, on dénombre des entités séparées, isolables, utilisables, interchangeables et exploitables. En un mot, recenser, dénombrer, c’est dans ce cas refuser l’unicité, c’est se donner les moyens d’asseoir un pouvoir personnel avec autorisation implicite de tuer, et c’est là sans doute que le roi David s’est égaré. Aujourd’hui, avec le décompte et le contrôle constant et grandissant de chacune des unités que nous formons, ne marchons-nous pas vers ce genre de recensement perpétuel ? Quoi qu’il en soit, linsertion historique de la naissance du Christ est une bonne nouvelle parce qu’elle crée un lien avec notre situation personnelle. Nous sommes bien nous aussi jusqu’au cou dans l’histoire des hommes et dans la nôtre en particulier, ou je me trompe ?

Écoutons la suite. « Joseph, lui aussi, quitta la ville de Nazareth en Galilée, pour monter en Judée, à la ville de David appelée Bethléem, car il était de la maison et de la descendance de David. Il venait se faire inscrire avec Marie, son épouse, qui était enceinte. »

Joseph est bien de descendance royale, de la lignée de David. Nous aussi, de la lignée de la conscience, ‘enfants de noble origine’, disent les bouddhistes. Nous en souvenons-nous ?

Et Marie ?
Marie, c’est nous encore, mais nous en puissance seulement dans la mesure où c’est nous dans notre virginité, comme l’ange Gabriel l’a bien précisé. Les pères de l’église au Moyen-Age ont affirmé la virginité physiologique de Marie, avant, pendant et après l’accouchement. Cela me laisse rêveuse, cet hymen qui résiste à un accouchement, mais c’est forcément miraculeux… Par ailleurs, indépendamment de cette allégation, la virginité est le symbole de la pureté, c’est-à dire en chimie, l’absence de mélange, du 100% pur! La virginité dit donc : « Je suis sans mélange, comme de l’eau pure ».

La phrase de Luc que je vous ai lue nous donne deux informations précieuses. La première paraît banale : c’est la femme qui devient mère, et jamais l’homme. C’est à dire que, homme ou femme, c’est à notre partie féminine d’accueillir, de porter et d’accoucher l’enfant intérieur, fils du Très-haut. Ce n’est pas à notre partie masculine qui, quand elle est impure, s’agite, fait du business, aime la guerre et vend des armes. Celle qui s’installe comme numéro 1 à la place de la vie. Aujourd’hui par exemple, avons-nous laissé de la place au féminin, ouverture, accueil et confiance ? Sommes-nous restés tranquilles comme Marie plus tard devant le berceau?

La deuxième information donnée par ces quelques lignes, c’est que nous ne pourrons enfanter le Christ fils du Très Haut si nous ne retrouvons pas notre propre virginité, si nous ne faisons pas ce travail de nettoyage et de tri jusqu’à la pureté. Nos pensées sont-elles dans l’ordre et la lumière, et nos émotions à leur place ? En d’autres termes, n’y a-t-il pas de mélange, pas de contamination entre nos pensées et nos émotions? Et puis, est-ce que nous choisissons de dire oui à la vie sans une pincée de non ? Sans compromission ? Ou alors nos pensées, nos émotions et nos comportements ménagent-ils plus ou moins sciemment une place à la peur ? A la colère ? La plainte etc ? La pureté sans mélange c’est aussi la clarté de nos choix, comme ceux des petits enfants. Et notre corps juste là maintenant, quel renseignement nous donne-t-il ? Est-il tranquille et détendu comme il nous a été donné bébé ou accablé de toxines et de stress ?

Poursuivons.
« Or, pendant qu’ils étaient là, arrivèrent les jours où elle devait enfanter. Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune. »

Pas de place dans la salle commune.
La salle commune c’est nous bien sûr. Et qu’y a-t-il de caractéristique dans une salle commune, dans un réfectoire, une gare, un stade, ou un préau d’école ? Hein ? Le bruit. Avez-vous essayé de faire taire une salle commune ? Si nous y arrivions, combien de temps obtiendrions-nous le silence ? Le bruit n’aime pas le silence, il s’ennuie. Une minute lui semble déjà si longue qu’on en fait un deuil national.

Alors en nous, qu’est-ce qui fait tout le temps du bruit ? Notre tête. Notre mental et ses pensées. En d’autres termes, comme il faut du silence pour concevoir et enfanter le fils de Dieu, nous savons qu’il ne naîtra pas au milieu de notre mental. Inutile de chercher par là. C’est clair : là comme dans les hôtels de Bethléem, il n’y a pas de place pour le divin enfant. Il faut donc pour aller à la rencontre de cet enfant en nous commencer par sortir de la salle commune et apprivoiser le silence. Quel est notre temps moyen de silence entre deux de nos pensées ?

C’est là qu’intervient la crèche, qui est selon le dictionnaire une « mangeoire à l’usage des bestiaux, installée le long du mur de l’étable, de l’écurie ou de la bergerie. » D’où par extension du sens, toute la bergerie ou l’étable. Que nous raconte la crèche ? D’abord, que Dieu et les rois de la terre n’ont pas les mêmes critères. Selon Dieu, la véritable souveraineté se trouve dans l’humilité, mais, vous voyez Macron ou Elon Musk dans une étable ? Ce n’est pas notre opinion non plus, même pour nous. D’ailleurs le Christ prévient qu’il est plus difficile à un riche (un adulte, un penseur, un alourdi d’argent, de principes ou de savoir) d’entrer dans le royaume des cieux qu’à un chameau de passer par le chas d’une aiguille. La richesse représente ici tout ce qui est surajouté à notre nature innocente et simple d’enfant, cet enfant qu’il faut redevenir et qui se fiche du lieu où il crèche, du moment qu’il fait chaud, qu’il est nourri, protégé et aimé.

La crèche nous alerte donc sur ce point : pour porter le Christ il va falloir bannir tous nos conditionnements, nos préjugés et nos entraves, nous ouvrir à la fabuleuse liberté de Dieu. Elle nous pose crûment cette question : quel travail de libération as-tu mené sur tes emprisonnements ? Les as-tu seulement vus? Considères-tu les miséreux de tes bidonvilles comme des enfants rois ou alors n’as-tu pour eux que du mépris, ou pire, de l’indifférence ? As-tu compté tes richesses et pesé ton savoir ? As-tu vérifié si cela t’approche de la légèreté de vivre ?

 

Notons aussi que la crèche est parfois représentée comme une grotte. Cela doit avoir une signification très ancienne car on a trouvé aussi des sanctuaires de dieu Mithra à l’intérieur de grottes naturelles. Ce culte ancien était très répandu même chez nous en Gaule et plus généralement en Europe. La particularité de la grotte est qu’elle se trouve à l’intérieur de la terre, cachée. Wikipedia nous informe que « cependant la plupart de ces temples étaient construits artificiellement et se contentaient de reproduire la forme d’une grotte. » Une crèche en somme. Si nous voulons suivre la direction que cela nous indique, c’est vers le dedans qu’il nous faudra aller. Dans notre terre. Et qu’est-ce qu’on y célébrait dans cette grotte ? La naissance de ce dieu soleil, le 25 décembre.

Revenons dans la crèche évangélique, où se trouve une mangeoire. Dans la mangeoire, Jésus. Le récit insiste lourdement sur cet élément. Après la première mention que je vous ai lue, les anges s’adressent ainsi aux bergers : « Et voilà le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. » Et en effet, ceux-ci « découvrirent Marie et Joseph, avec le nouveau-né couché dans la mangeoire. » Trois fois. On ne peut pas dire plus clairement qu’être Christ, être la manifestation de l’intelligence supérieure et de l’amour inconditionnel, c’est se faire aliment pour les animaux que nous sommes… Et quel animal ! existe-t-il sur terre un seul animal plus effrayant que nous?

Ah, mais stop ! Si être Christ, c’est direct être mangé, est-ce que ça vaut vraiment la peine de se donner tant de mal à faire naître cette dimension en nous ? Si c’est pour être aussitôt sacrifié… La question est légitime, et nous y avons souvent répondu. Répondu non bien sûr.

Pourtant les anges n’en font aucun cas. Ils annoncent une « bonne nouvelle », à tel point qu’ensuite, Mathieu dit qu’il y eut avec l’Ange une troupe céleste innombrable, qui louait Dieu en disant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’il aime. » D’ailleurs Gabriel avait informé Marie que son enfant régnerait éternellement sur la maison de Jacob, et que son règne n’aurait point de fin. Si nous devenons Christ, notre règne n’aura pas de fin non plus, sans doute. S’il n’a pas de fin, est-ce qu’il a eu un début ? Où ce trouve ce trône et quelle partie de nous y siège ? Un jour, le Christ dira : « Mon royaume n’est pas de ce monde, » mais pour l’instant, la bible nous donne une première réponse plus facile à comprendre. Le trône est dans l’étable. Alors entrons.

Au premier abord, nous sommes saisis par l’odeur. Une étable, ça sent la terre, la bête, la chaleur animale et pas seulement !  Odeur des bêtes, odeur de pipi, odeur de bouse, odeur du lait qui gicle dans les seaux. Quand mes enfants étaient petits nous allions chercher ainsi le lait dans une ferme de montagne, mais pas tous : « Ah non ! ça pue, c’est dégoûtant ! » Pourtant ce lieu insolite était à la fois répulsif et attractif: le foin, la tranquillité des vaches et des fermiers, la pénombre et les meuglements aléatoires nous donnaient l’impression d’être entrés dans un autre monde, un temps arrêté depuis le début des temps, une sorte de grotte immémoriale.

Or n’oublions pas que la crèche, c’est nous. Nous, oui, mais où ? La salle commune c’était la tête, mais quel est cet endroit creux, sombre et chaud, animal, rempli de pipi-caca, d’odeurs peu suaves, avec une mangeoire ? Pipi caca, c’est pour la vessie et le gros intestin, la mangeoire c’est l’estomac… Nous y sommes ! Dans la symbolique de Noël, la crèche, c’est le ventre. D’ailleurs nous aussi, graines de Christ, où avons-nous poussé ?

Quelle information nous donne cette partie du récit ? Elle dit : « Au milieu de la crèche, au milieu de ton ventre, repose l’enfant endormi, son souffle est tranquille. Toi aussi que ton ventre s’élève et s’abaisse gentiment au souffle du petit immobile. Car c’est le ventre la maison de l’Enfant. Laisse-toi bercer par le silence surnaturel de ce lieu où rien ne se pense tandis que tout se respire et toi, fais pareil : ne pense pas et respire. » Mais au quotidien, quand nous respirons, où est-ce dans notre corps ? Et juste pour aujourd’hui nous avons aimé notre ventre, rien que le temps d’une petite méditation ou d’un court massage? Quel type de nourriture avons-nous déversé dans sa mangeoire ?

Revenons à notre visite. Dans la crèche, le petit Jésus est au centre. A sa droite, il y a Joseph et le bœuf, tandis qu’à sa gauche, côté cœur, il y a Marie et son âne, sans doute une ânesse qui reste à ses côtés pour veiller sur elle et le petit dans une solidarité de femelles. Gardons notre principe de lecture : tout ça c’est nous, c’est en nous. Pourquoi Joseph et Marie sont-ils postés ainsi de chaque côté du Christ ? Ils représentent les colonnes masculines et féminines de nos corps, le yin et le yang ; la gauche et la droite, la matière et la lumière, ce qui vient d’en bas et ce qui vient d’en haut.

Pour représenter cela, les santons figurent Joseph debout et Marie agenouillée. D’ailleurs la Bible pour être bien claire sur ce point va jusqu’à dire que Joseph est seulement le père adoptif du Christ, son vrai père étant l’Esprit Saint. “Esprit”, en latin spir-itus c’est à dire souffle. Juste comme comme la racine des mots ins-pir, ex-pir ou re-spir-ation. Ou comme spir-itualité. L’évangile en parlant plus tard de la descente e l’esprit sur les apôtres la décrit comme celle de langues de feu. L’esprit, le souffle est donc feu et lumière. En d’autres termes, en plaçant l’enfant exactement entre Joseph debout et Marie à genou, il nous est dit expressément que le Christ naît du mariage de la lumière avec la matière ou encore de l’Esprit avec Marie, du Yang avec le Yin. « Apprends à connaître les colonnes à la droite et à la gauche de ton centre, sinon il n’y aura pas d’enfant au milieu » clament les santons. Le faisons-nous? Avons-nous conscience que le souffle est lumière ou comme le disent l’Inde et la Chine, que le souffle est prana, chi ? Aujourd’hui par exemple, avons-nous aspiré, respiré avec l’intention de nous remplir d’un peu de chi ? L’avons-nous conduit jusqu’au ventre? Et avons-nous bien ancré nos pieds dans la terre à défaut de nous agenouiller ? Nous sommes-nous laissé éclairer ? Notre corps à nous est obscur, il suffit de fermer les yeux pour le savoir.

Et le bœuf près de Joseph à droite de l’Enfant, quel secret nous délivre-t-il ? Le bœuf est le nom générique du taureau dans la tradition judéo-chrétienne. Ce taureau était présent dans de nombreuses civilisations. Symboliquement, il représente l’énergie sexuelle chez les Egyptiens avec Apis. C’est lui que Mithra (encore lui!) sacrifie sur les murs de ses temples, comme firent les Hébreux aussi en quantité innombrable. Et vous souvenez-vous de cet exploit d’Hercule avec le taureau de Crète ? Il dut sans le tuer, maîtriser, monter et ramener docile entre ses jambes ce monstre piétinant et ravageur. Aujourd’hui encore les corridas nous montrent comment un petit homme en habit dit « habit de lumière » doit maîtriser un taureau noir et fumant bien qu’on l’ait préalablement drogué (le taureau, pas le toréador). Au cas où nous hésiterions encore à accepter l’analogie taureau-force sexuelle, regardons ce beau toréro qu’on récompense en lui octroyant les oreilles de l’animal. N’est-ce pas bizarre ? Les oreilles sont pour les Chinois les portes des reins, directement liés aussi à la force sexuelle. Cette victoire sur le taureau exprime symboliquement la parfaite maîtrise de l’énergie sexuelle, qui ne se résume pas à un usage de la sexualité conforme à la morale.

En d’autres termes, le taureau qui ne sait pas quand on le lui demande, se tenir tranquille comme un bœuf, qui ne peut conduire une ligne de sillon droit et précis sous l’ordre de son maître, piétinera furieux le Christ en nous avant qu’il ne se forme. Maîtriser le taureau est certes, selon les Grecs, un exploit herculéen, mais il est possible puisqu’à la crèche le taureau ne détruit pas le bébé Christ, mais au contraire le réchauffe de son souffle. Telle est la leçon donnée ici : « Surveille tes pulsions sexuelles et raffine cette énergie, car maîtrisée, la force sexuelle donne tout pouvoir. Elle est la base de la créativité puisqu’elle te fera un descendant. Elle pourra aussi faire naître en toi le Christ. Dès lors, elle sera au service de ton divin enfant. Mais fais attention ! Non maîtrisée, elle est source de violence, de destruction et d’autodestruction. » Une fois le message compris, il reste la sempiternelle question du comment. Le tao donne des réponses mais aujourd’hui, centrons-nous sur les informations de la crèche. En continuant à cartographier la crèche et notre ventre en superposant l’une sur l’autre, nous nous rendons compte que, à droite du bébé, à droite du ventre, le taureau est à la place du foie.

Nous avons donc une piste de travail : commencer par nous montrer attentif à la santé de notre foie. Le conseil de base sera d’abord de le nettoyer par des pratiques diverses et une alimentation saine. Ensuite, regardons en face notre vie sexuelle. Dans ce chantier de nettoyage et d’alchimie, où nous situons-nous ? Sommes-nous déséquilibrés dans un sens ou dans l’autre ? Savons-nous diriger cette énergie dans la direction que nous avons décidée ? Sommes-nous en paix avec notre sexualité ? Notre taureau est-il sauvage ? Est-il à l’article de la mort ? Ou est-il semblable à celui de la crèche ?

Et que nous apprend l’ânesse ? Elle est à gauche de Jésus, comme l’organe de la rate dans notre ventre. La médecine chinoise met la rate en lien avec la terre, avec la chair, avec l’incarnation. Voilà pourquoi Marie est placée près de l’ânesse : pourrait-il y avoir une incarnation sans une mère ? Les bouddhistes disent que même Bouddha a eu une mère. Les taoïstes voient aussi dans la rate le siège de l’égo.

Cette analogie entre l’âne, la rate et l’égo me rappelle une conversation avec un de mes neveux parti à Compostelle avec un âne. Il m’a dit qu’il n’y avait rien de plus vrai que l’expression « têtu comme un âne ». « Tu ne vas pas où tu veux avec lui tant qu’il n’a pas reconnu que c’est toi qui commandes. Il peut s’arrêter brusquement et même te barrer la route ! Tu dois lui administrer la preuve que c’est toi qui disposes de la carotte et du bâton… c’est toute une affaire mais quand tu as réussi, un âne, c’est un trésor. Intelligent, serviable, solide et fiable. En plus, avait-il ajouté, le mien est un rigolo. » Ainsi de notre égo. Si nous le laissons faire, jamais il ne nous portera jusqu’à la crèche : le chardon au bord du chemin l’intéressera bien davantage que la naissance du Christ. Le tiercé, la courbe du Covid ou la saison X d’une série l’intéressera bien davantage que de chercher une grotte. Mais puisque l’âne de la crèche souffle sa chaleur au service de l’enfant Jésus, c’est parce qu’il existe un état où l’égo sait aussi être heureux couché près de l’enfant Dieu, tranquille serviteur.

Le conseil de la crèche est donc de nous intéresser à notre rate. La purifier par une vie plus proche de la nature et une attention au présent. Veillons par exemple à nous offrir régulièrement un moment de nature. Il y avait autrefois une coutume à la campagne. A peine levé, le paysan jusqu’à un âge très avancé sortait de chez lui et faisait le tour de son potager, jardin, poulailler etc, pour voir si tout allait bien et où en était la nature. Une sorte de bonjour reconnaissant avant les affaires de la journée. J’avoue que moi aussi, j’ai un jardin et que je n’en fais jamais le tour. Il me reste l’autre conseil de l’âne de la crèche : observer qui de mon mental ou de moi est le maître de ma vie. Qui est-ce qui commande chez moi ? Qui obéit à qui ? Nous avons parfois d’étranges arrangements avec notre égo qui accepte de se modifier un peu, tout en restant plus discrètement le premier sur la liste de nos priorités !

Prenons encore un instant, observons l’ensemble de la crèche. Que voyons-nous ? dans le calme de la nuit, aux rayons des étoiles, tout converge autour du bébé-roi au centre. Joseph et Marie, le bœuf et l’âne, le yin et le yang, la sexualité et les capacités de penser, tout est centré, tout est silence. Rien n’est figé et pourtant rien ne bouge. « Tiens-toi tranquille », dit le récit de Luc, c’est la base.

La suite du récit de la nativité, nous la trouvons chez Mathieu. Et là, surprise ! Elle se trouve aussi comme chez Luc, au chapitre 2, comme Beth, et Bethléem. Sans le 1 avant le 2, il n’y aurait pas de 2. Le 1 ne se voit pas, mais sans lui, aucun Noël n’aurait lieu.

Comme chez Luc, on commence par un ancrage historique : « au temps du roi Hérode le Grand. » Puis, tout de suite on enchaîne sur les Rois Mages dont l’existence historique est moins certaine, mais la puissance symbolique énorme. Or, voici que des mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son étoile à l’orient. “» dit Mathieu.

Tiens ! Selon ce texte, ce ne sont pas des rois mais des mages, c’est-à-dire des magiciens, et il n’est pas question de nombre. Pourtant la tradition nous dit bien qu’ils sont trois. Pourquoi trois? Pour représenter les trois continents alors seuls connus ? Les trois centres vitaux du ventre, du cœur et de la tête ? Il existe aussi une interprétation cosmique. Il se trouve qu’en hiver la constellation d’Orion se trouve au centre du ciel. Orion ce chasseur céleste porte une ceinture faite de trois étoiles en lignes qu’on nomme justement en astronomie les trois rois mages. Dans ce cas, les mages (qui sont nous n’est-ce pas?) représentent cette part de nous qui parcourt le ciel comme un chasseur en quête d’infini.

Pendant que nous sommes le nez en l’air vers Orion, regardons le firmament de cette nuit d’hiver. A l’est d’Orion, c’est la constellation de la Vierge, et comme l’étoile qui se lève du côté du soleil, le ciel nocturne montre que le petit Jésus naît de la Vierge, ce qui est encore une autre façon de comprendre la virginité de Marie. A l’ouest, c’est le poisson. En d’autre termes, le travail de l’enfant portera ses fruits pendant toute l’ère du poisson dont nous venons de sortir puisque nous sommes entrés dans l’ère du verseau. De plus, il se trouve qu’en Grec les initiales de “Jésus Christ fils du Dieu Sauveur,” forment un acronyme. C’est le mot ichtus, c’est-à-dire poisson. Enfin, la vie de Jésus telle qu’elle nous est transmise fait une grande place au poisson, qu’il s’agisse de la multiplication des poissons ou du métier de pêcheur des apôtres. Jésus dit même à Pierre qu’il deviendra pêcheur d’hommes.

Les brèves indications de Mathieu qui nous incitent à regarder vers le ciel donnent à la naissance du bébé roi une insertion historique d’une autre échelle que les calendriers de la terre à la naissance du Christ. Cela renvoie d’ailleurs aux étoiles peintes sur les plafonds des grottes de Mithra. Tout en donnant à cette naissance une importance cosmique, cela renforce son sens symbolique : le Christ nait de la pureté – la vierge, il est destiné à la multitude qui vit sous l’eau loin de la lumière – le poisson. Et cette multitude, c’est qui? Nous dans nos richesses et nos contradictions intimes, dans nos mémoires ancestrales, dans notre obscurité. Nous dans notre immersion dans la matière qui avons oublié notre nature spirituelle, lumière et du coup empêchons l’alchimie.

N’oublions pas non plus l’étoile la plus visible de cette lecture cosmique : celle qui a déplacé les mages jusqu’à Jérusalem. Elle annonce un roi et cela bouleverse Hérode qui découvre Bethléem. Il envoie les mages comme indics pour son noir dessin : se débarrasser dans l’œuf de son rival. Je n’insisterai pas sur l’identité d’Hérode et de cette partie de nous qui a toujours peur d’être détrônée par tout le monde, et principalement par l’éveil de la conscience. De combien de machinations nous rendons-nous capables pour étouffer le bébé roi sitôt qu’il nous offre un peu de compréhension ? D’ailleurs tout le travail que nous indique le récit, est-ce qu’Hérode en nous voudra s’y mettre ? Mais suivons les mages.

Et voici que l’étoile qu’ils avaient vue à l’orient les précédait, jusqu’à ce qu’elle vienne s’arrêter au-dessus de l’endroit où se trouvait l’enfant. Quand ils virent l’étoile, ils se réjouirent d’une très grande joie, dit Mathieu.

Tout le monde préfère être né sous une bonne étoile quelle qu’elle soit. Mais il y a des êtres pour lesquels l’univers invente une étoile. Le Christ a été signalé par une grosse étoile à cinq branches, apparue tout exprès pour lui comme un GPS et Virgile dit la même chose d’Enée. Après la ruine de Troie, ce fils d’Anchise roi de Troie et d’Aphrodite-Vénus la déesse de l’amour, fut guidé par une étoile personnelle jusqu’au rivage de ce qui devint plus tard Rome. Pour Jésus, l’étoile a été identifiée : c’est l’étoile du berger, c’est-à-dire Vénus. C‘est l’amour qui nous conduira à la découverte du Christ en nous.

Plus précisément, selon ce que disent les alchimistes et les Francs-Maçons, l’étoile, l’étoile flamboyante même, symbolise l’accomplissement. Car qu’est-ce qu’une étoile, sinon d’abord un soleil ? Et qu’est-ce que le soleil qu’on voit, sinon pour les hommes l’occasion de se rappeler le soleil qu’on ne voit pas, la lumière divine de la pleine conscience ? La maman du petit Jésus a reçu aussi le nom d’Étoile du matin, comme la reconnaissance de sa réalisation du grand-œuvre, autrement dit de sa part divine, claire et pure conscience. Lorsque l’étoile s’arrête sur la tête du divin enfant, c’est la signature que Dieu est là, que l’enfant n’est pas séparé de son origine, qu’il est bien « le Fils du Père ». Et lorsque cela arrive, qu’est-ce qui se passe ? les mages nous le disent : Ils se réjouirent d’une grande joie.

Chez les Tibétains, depuis bien avant Jésus et les francs-maçons, on médite sur l’étoile à cinq branches avec Vajra Sattva et les Cinq Dyanis bouddhas. Et encore aujourd’hui, ici même, dans les halls des supermarchés, l’étoile à cinq branches clignote en haut des sapins, comme un rappel obstiné dans notre monde désacralisé : « Enfant, pour recevoir des cadeaux au pied de l’arbre sur la terre, il te faudra regarder l’étoile en haut vers le ciel. » L’étoile est dans le ciel, n’oublions pas de lever le nez, le cœur et les yeux pour la suivre.

Nous sommes d’accord que c’est un vaste chantier, l’œuvre de toute une vie, qui permet petit à petit de redresser nos actes erronés et nos chemins tordus et ceux de de nos ancêtres. Ainsi nous nous rapprocherons de l’harmonie avec notre père et notre mère célestes. Et voyez! L’homme de Vitruve dessiné par Léonard de Vinci, il s’intègre parfaitement dedans, la tête en haut vers le ciel et les deux jambes sur la terre. Un jour l’étoile ce sera nous.

Enfin, une autre des caractéristiques des étoiles est qu’elles se voient de loin. D’ailleurs les mages – un blanc, un noir et un rouge peut-être venu d’Inde selon la légende dorée de Voragine, suivent depuis des endroits très différents la même étoile. C’est une façon de dire qu’il y a nombreux pays, de nombreuses cultures, de nombreuses coutumes, de nombreuses couleurs de peau, mais une seule vérité : il n’y a qu’une seule origine, il n’y a de Dieu que Dieu. Les mages ne sont pas venus de Palestine, ils s’y sont retrouvés. Certes, il faut commencer par lever le nez : au ras de terre, on voit surtout les différences.

La suite du récit est vraiment enthousiasmante ! Elle nous dit : cherchez et vous trouverez. Les mages trouvent le Christ. D’ailleurs leur visite porte aujourd’hui encore le nom d’épiphanie, du grec : faire voir, montrer. Les mages s’éveillent donc à ce qui était caché. Ils entrèrent dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie sa mère ; et, tombant à ses pieds, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe.

Les rois mages nous indiquent ce qui se passe à l’heure de la Rencontre. Ici donc, le récit donne à la fois une série de consignes et un dévoilement, une épiphanie, de ce qui se passera lorsque le Christ naîtra en nous. D’abord, nous devenons rois : l’or, l’encens et la myrrhe, c’était très cher et proprement des attributs royaux.

L’or, c’est le symbole dans la densité de la lumière, attribut royal, principale richesse, sagesse. Dans notre corps, où est cet or de sagesse ? Dans le centre supérieur des glandes du cerveau que les taoïstes appellent la chambre de cristal, c’est cet or la lumière qui brille sur le front des sages, le troisième œil ouvert, et selon Jésus la lampe du corps. Ajna chakra. A l’heure de notre nativité, nous ne pourrons qu’offrir notre lumière à la lumière. Travaillons à ouvrir cet œil, prenons déjà conscience de l’espace entre nos deux sourcils tandis que nous respirons. Reconnaissons que nous sommes lumière et sagesse. Reconnaissons cet or en nous et ne l’enfermons pas pour nous : nous recevons, donnons. Respiration.

L’encens, c’est ce bâton sacré dont la fumée montante embaume le ciel et purifie notre espace tandis qu’il disparaît dans l’offrande. C’est le symbole de la prière qui monte vers Dieu et nous mène à la disparition de nous-mêmes. De quelle partie du corps jaillira-t-elle ? Du cœur n’est-ce pas, c’est-à-dire de l’amour. A l’heure de la rencontre, l’offrande aura consumé toute idée de notre personne dans l’unique sensation de l’amour, du moins c’est ce que racontent unanimement les récits de cette expérience. Le conseil est le même: N’attends pas, fais monter les volutes de l’amour inconditionnel dans ta vie de chaque jour, que ton amour cherche l’Amour.

La myrrhe, c’est une sorte de résine parfumée dont on disait qu’elle était un hymne à la vie. Elle servait donc d’onction à la fois à l’heure de l’amour et à l’heure de la mort pour l’embaumement. Elle concerne le corps, et son centre énergétique est le ventre. Les témoignages qu’on peut lire par ailleurs nous expliquent comment comprendre le cadeau de la myrrhe. A l’heure de la nativité, l’amour et la mort fusionneront, notre mortalité s’anéantira dans l’éternité et notre corps ne sera pas oublié. En attendant, le conseil, c’est de donner le plus de vie possible à notre corps puisqu’il est le temple de Dieu. Prenons-nous vraiment soin de notre corps ? Le respectons-nous ? Avons-nous conscience qu’il est fait pour devenir un lieu de lumière ?

Or, encens et myrrhe ; tête, cœur et corps, voilà une nouvelle raison pour le chiffre trois : esprit, sentiments, manifestation véridique. Mais attention ! Mathieu raconte que les trois grands rois entrent et se prosternent ensemble. La consigne est donc claire : que notre corps, nos sentiments et notre intelligence marchent ensemble et unifiés ou alors nous n’arriverons pas jusqu’à l’Enfançon. La conscience une ne peut naître dans la division.

Comment ça, ils se prosternent ?

Se prosterner, ce n’est vraiment pas de notre goût, petits Hérode que nous sommes, nous qui n’avons pas compris que si c’est à l’intérieur que nous rencontrons l’éveil, ça signifie que ce à quoi nous nous éveillons est déjà là. Les mages se prosternent devant ce qu’ils sont, et qu’ils ne connaissaient pas (nous revenons au sens du mot épiphanie) … Quoi ! disent donc nos petites personnes, incliner jusqu’à terre notre corps, notre poitrine (ce sternum qu’on retrouve dans prosterner) et notre front ? jamais ! C’est trop humble pour être supportable ! C’est ainsi que les santonniers représentent plutôt les rois mages genou en terre, comme ceux qui venaient devant leur suzerain pour l’adoubement. Cette question de la prosternation nous interroge directement sur la façon dont nous cherchons à rencontrer cet espace, cette conscience que la science aujourd’hui nomme conscience intuitive. Y allons-nous le menton haut ? Consentons-nous à poser le genou en terre en signe d’allégeance ? Ou rendons-nous complètement les armes de notre égo à la terre ? Selon moi, il y a une question sous-jacente : de quoi avons-nous peur ? Lorsqu’il y a une entière confiance, nous pourrions bien faire comme les chiens et chats qui se roulent même sur le dos dans une intense satisfaction !!

Nous arrivons à la fin. Après un temps dont le récit ne donne pas la durée – et pour cause puisqu’ils ont rencontré le sans temps, les mages vont s’en retourner. Mais, termine Mathieu, avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin. Rencontrer la conscience de l’univers, ce n’est donc pas perdre tout espoir de retrouver sa terre et les plaisirs de l’incarnation, simplement ce sera par un autre chemin ; désormais, aucun Hérode ne les trompera plus. Après l’expérience de la connaissance, le chemin ne peut plus être celui de l’ignorance, l’étoile est devenue intérieure et comme le Christ, comme Marie étoile du matin, les mages brilleront pour le bien de tous les êtres. Ainsi de nous, vivant peut-être la même existence mais pas de la même façon.

Si l’enfant en nous s’est laissé bercer et émerveiller par l’histoire de l’amour qui s’incarne, il lui est possible de nous emmener, nous les petits vieux que nous sommes, vers le bébé Jésus qui est dans le temps et hors du temps. Il nous rendra capable d’écouter dans le silence la musique des anges. « Laissez les petits enfants venir à moi » disait Jésus. Nous sommes libres, comme Hérode, de persécuter le bébé roi. Nous sommes libres d’y être indifférents comme les habitants de Bethléem. Et comme Joseph et Marie, les bergers, les moutons, les chameaux et les rois mages, nous avons aussi la liberté de nous mettre en route. Il nous appartient et à nous seuls, de décider de renaître. Il nous appartient de choisir le travail vers le grand inconnu et d’ouvrir les portes de la connaissance hors du champ du mental en nous effaçant devant l’immensité, en nous baignant dans la conscience. Dans notre monde qui craque comme une bicoque sous la tempête, nous pouvons partir à l’aventure de la sagesse, de l’intelligence et de la compassion universelle. Par nous, le hors-temps mettra des paillettes dans le temps et l’ensemencera de vie.

Pour nous encourager à cette révolution intérieure dont seul le chemin nous est accessible, l’arrivée ne dépendant pas de nous mais de l’étoile, rappelons-nous la date de Noël : juste après le solstice d’hiver. Les jours allongent très lentement, c‘est seulement peu à peu que la nuit décroît, mais les cadeaux arrivent dès le 25 décembre sous le sapin ! Alors réjouissons-nous avec les petits enfants, cherchons à nous élever et préparons les guirlandes de la joie dedans comme dehors…

Joyeux Noël !